Ce dixième motif de Confettis d’empire, « La peinture à Alger », célèbre la mémoire des dures relations entre ce pays d’Algérie et la vieille France, à travers la guerre liée à un faisceau de manifestations artistiques troublantes : à peine la conquête entamée, en 1832, voici le premier des peintres romantiques nationaux, Eugène Delacroix, débarqué avec ses carnets de croquis — en résultera l’œuvre orientaliste majeure, Femmes d’Alger dans leur appartement de 1834. A l’autre bout de la domination française, ce n’est pas un hasard si Pablo Picasso peint, dès la Toussaint 1954, date de l’insurrection algérienne, une série en écho à Delacroix, de quinze tableaux sur ce thème des Femmes d’Alger. Mais il y a plus, Delacroix, lecteur de Lord Byron, donnera plusieurs traductions picturales du poème The Giaour. En 1929, Jean Alazard, acquiert à Paris pour le musée d’Alger dont il est le conservateur, le tableau intitulé Giaour traversant un gué à la poursuite des ravisseurs de sa maîtresse, de loin le plus cher des achats réalisés pour constituer la collection de la nouvelle institution algéroise inaugurée l’année suivante à l’occasion du centenaire de la conquête de l’Algérie par la France. Or, eu égard à son titre, mais aussi à son thème, ce tableau offre un curieux destin puisqu’il franchit de nouveau la Méditerranée, au début de 1962, à la faveur d’un « rapatriement » hâtif d’œuvres d’art. Mais les traversées du gué méditerranéen — à la recherche de quels ravisseurs de quelle maîtresse ? — ne s’arrêtent pas là puisque Giaour est finalement rendu au musée d’Alger en 1969, en même temps que cent-cinquante six autres peintures. Quelle allégorie le poète admirateur de Delacroix — lac de sang hanté des mauvais anges — Charles Baudelaire tirerait-il de ces traversées du cavalier au turban noir d’une rive à l’autre ?
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