À la vitesse de soixante mille kilomètres par heure, elle s’avance dans l’immensité de l’espace hors du système solaire, la sonde Voyager 1 lancée de cap Canaveral le 5 septembre 1977, dix ou onze jours après sa jumelle Voyager 2. L’année 1979, elle s’est approchée de Jupiter, la grosse planète mordorée comme les agates de ton enfance, la photographiant à dix-neuf mille reprises ainsi que ses satellites principaux, Io dont les volcans crachent à plusieurs centaines de kilomètres de haut, Ganymède dont la croûte glacée recouvre un océan d’eau salée. L’année suivante, elle aborde Saturne et observe de près ses anneaux dans lesquels se lovent de petites lunes, ainsi que le géant Titan. Puis elle poursuit sa route vers les confins du système solaire, franchissant en 2004 le « choc terminal », pénétrant successivement dans l’héliogaine puis traversant l’héliopause et filant désormais à dix-neuf milliards de kilomètres de la Terre dans le plasma interstellaire parmi les vents soufflés par les étoiles, la matière rejetée par les supernovae, en direction d’une naine rouge nommée Gliese 445 qu’elle devrait avoisiner dans quarante mille ans, emportant avec elle de pacifiques messages parmi lesquels le concerto brandbourgeois numéro deux de Bach ainsi que des images et des sons de notre condition terrestre par le truchement desquels nous touchons du doigt une sorte d’infini.
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