De la main à charrue à l’œil à l’écran
de la clé à la ligne au clic à la chaîne
c’est toujours le menu fretin qui trinque
au marché des esclaves volontaires
où viennent se placer les mères porteuses
à la fin de leur stage d’employabilité
guidées par des consultants en précarité
sur la trajectoire de progrès qui mène
des pauvres travailleurs aux travailleurs pauvres
quand ils ont touché le salaire minimal de la peur
et jouissent de leur reste à vivre
au terme d’une agile conduite du changement
telle que stipulée dans le contrat de la onzième heure
contresigné par la dernière caissière
qui s’endort en se massant les pieds
et rêve à la pointeuse à la peinture écaillée (qui faisait cling !)
et rêve à l’enveloppe de la fin de semaine
qu’on ouvrait d’un doigt fébrile contre la blouse pour en sortir quelques billets pelucheux avec la menue monnaie des minutes
dans l’oubli du pain durement gagné et du frigo rempli le samedi
dans l’oubli des mille métiers caducs :
les dactylos
les mécanos
les cheminots
mais le réveil dans les mille misères jamais éteintes
de cette armée de réserve d’enfants confectionneurs de tee-shirts
les taillables et les corvéables de la dissémination sans merci
courant après la valeur des acquis de l’expérience
pour délier une bonne fois le nœud de la subordination
qui les étrangle au juste prix des cinquante centimes la course
visant la délivrance des parties prenantes sous emprise
de quoi déjà ?
la gouvernance ?
la compétence ?
la performance ?
lampiste ayant gueule de l’emploi cherche place stable dans société des loisirs promise :
NE TRAVAILLEZ JAMAIS
donnez-nous dès aujourd’hui notre universelle pitance
de chasse et de cueillette au pain génétiquement modifié
en tout compris avec le gavage du cirque en images qui va avec.