Vers le pays sans mal

Les Dépeceur de Montréal, les Mohamed Merah ou les Anders Breivik n’écrivent plus comme les assassins d’autrefois à la police et aux journaux des lettres à l’orthographe approximative et à la poésie cruelle. Ils postent sur la toile des messages relayés par les médias qui les encadrent de publicités attrayantes comme des nuits de Walpurgis, des longs couteaux ou de cristal. À ce régime-là nous finirons tous par aller danser le cakewalk à Pasewalk. Apaches, nymphes, derviches, Mata Hari la serpentine, tous consumés dans la danse du soleil ou de l’esprit. Totenköpfen et silhouettes aux longues cagoules pointues vacillent au sommet des collines autour des croix enflammées de l’empire invisible, rêvant d’en finir avec les épurés d’un monde meilleur. Car elle glisse la parole jusqu’au fond. Engloutie sous les images de l’œil cristallin des écrans, une croix gammée en forme d’araignée noire pleine de sang tatouée sur le front. À moins que ce ne soit une étoile. Comment savoir ? Il n’y a plus de masques. Le carnaval a pris fin dans les séries cultes. Moi aussi je serai golden boy quand j’aurai passé le milliard de lecteurs électroniques. Dans mon château de verre néo-grec suspendu dans le ciel, aux miroirs, velours et satin assortis aux stratocumuli, où des rossignols aux yeux aveuglés chanteront tout le jour dans leurs cages dorées. Il y aura toujours plein à manger. La faim, la faim, la faim, toujours la faim. Ma compagne à la peau brune enlacée à moi nous chevaucherons longtemps vers cette cité de la merci. Ma patrie. Les éclats de verre brilleront sur le sol comme des diamants. Au crépuscule, nous traversons des forêts où l’on entre et sort comme dans de vieilles baraques de foire. Sur des étagères sont exposés dans des bocaux des fœtus à plusieurs stades de leur développement. Est-ce bien moi ? Keep smiling baby. Tu es la plus belle de l’usine à rêves car tes rêves sont plus forts que l’usine. Une sorte de voyage de noces acheté à forfait, exotisme et kâmasûtra compris. La vidéo porno montre le bleu du ciel. C’est alors qu’il sera grand temps de rentrer au jardin : « Mais quand sortirons-nous de la vallée profonde des ombres pour aborder enfin l’île des bienheureux ? »

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