Comment la prendre, la lire, par quel bout, et comment s’étoile-t-elle, en quelles directions, à partir d’où et vers où, la littérature de langue française ? Si c’est une tresse, par le milieu, ses introuvables racines perdues, choisir un nœud dans la litanie des noms propres rangés dans l’ordre des vingt-six lettres qui forment son instrument – sa vieille charrue – par où elle demeure suspendue entre ciel et terre, à partir duquel la parcourir, la littérature de langue française, quoi ou qui sinon Rimbaud (Arthur), né le 20 octobre 1854 à Charleville-Mézières (Ardennes), auquel revenir incessamment, comme si Une Saison en enfer condensait d’un coup d’un seul tout ce que la littérature de langue française fit jamais advenir et fera jamais advenir, depuis le fond latino-celto-biblique jusqu’à son incertain futur qui s’enfonce dans le noir et blanc généralisé où se dissipe la couleur des voyelles – par exemple le A : « […] deux de ces mouches énormes, au corselet métallique et noir où luisent des reflets bleus sombres » (Claude Simon, Triptyque, p. 74) – depuis son avènement indiscernable du côté des brumes monastiques et de la Cantilène de sainte Eulalie – car il est impossible de dater avec précision l’apparition de la littérature de langue française – jusqu’à sa dissolution fatale, son effacement progressif, le dernier murmure poétique, une disparition dont personne ne s’apercevra et qui par conséquent a peut-être déjà commencé, le moment déjà passé, derrière nous, comme si le trou noir appelé Une Saison en enfer et le lampadaire métaphysique intitulé Illuminations tenaient une fois pour toutes lieu face à l’éternité – cette mer allée avec le soleil – de bréviaire de la littérature de langue française, la résumant toute en une concentration inouïe du verbe, contre toute adversité, comme s’ils étaient, avec Les Assis et les autres poèmes, le point de départ et le point d’arrivée à emporter vers les étoiles.
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